L'ailleurs et le pouvoir.
45. A quoi le groupe nous incite-t-il à penser ? Par exemple, je suis dans un banquet officiel. Des musiciens exceptionnels se produisent. Des chanteurs, de la musique ancienne, grandiose. Tous le banquet est sous le charme entre les plats. A la table d’honneur, imperturbablement, le président continue d’évoquer avec quelques notables, les affaires qui se préparent. La chute d’un notable peut-être, le financement d’un ensemble immobilier, des routes, des banques et des chemins de fer. Dans ce banquet, qui rassemble ceux qui sont au moins d’accord pour se montrer ensemble à une occasion donnée, il a ceux qui veulent bien considérer l’existence d’un ailleurs inconnu (cette musique par exemple). Ils s’en étonnent et ils s’y plongent, même s’ils n’y comprennent rien, quelques instants. Il y a ceux aussi qui sont entièrement pris par l’orchestration de la vie en société, selon les critères utilitaires du temps (aujourd’hui, à part la production et la vente d’armement, les « infrastructures » liées à la prospérité de modes dévastateurs de production d’énergie et de modes de transports, prennent beaucoup de place, et sont très bien cachées au public occidental derrière des slogans de « développement durable », mais c’est un secret). Les uns interrogent un instant leurs consciences, qui leur grisent les sens mais ne leur apportent aucune compréhension utile. Les autres, gestionnaires, interrogent aussi leurs consciences, mais des consciences courtes, dans le domaine de l’utilitaire. Pour eux, la musique est un divertissement, ou mieux, une concession à accorder à la « poésie humaine », au bénéfice de leur image de marque, pourvu qu’elle ne soit pas une gêne dans leurs affaires.